Article original le 18 septembre 2023
Le Parlement canadien a repris ses travaux pour ce qui sera probablement sa dernière session avant les élections. Si l’on en croit l’histoire, le gouvernement aura du mal à progresser avant les élections – et celui qui remportera les élections devra revoir sa réforme du secteur public.
L’aspect le plus mémorable de l’été 2023 au Canada sera probablement l’impact des phénomènes météorologiques extrêmes. L’avenir nous dira s’il s’agit d’un cas isolé ou du premier d’une longue série d’étés du genre alors que le changement climatique se poursuit. Les images de ciels devenus orange à cause de la fumée des feux de forêt, de murs de flammes avançant sur les villes évacuées et de champs et rues inondés pourraient perdurer. Ma propre ville natale, Ottawa, a connu deux avertissements de tornade, une rareté dans ces régions, à la suite de deux tempêtes hivernales majeures, qui n’en sont pas.
Ce fut une brève pause pour la politique conventionnelle et un répit bienvenu pour de nombreux fonctionnaires après les drames en série de la pandémie, un débat acharné sur le travail hybride et une grève de deux semaines en avril. Les questions qui avaient fait rage au printemps, comme l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, l'ingérence étrangère et le recours à des consultants en gestion, ont largement disparu de la scène. Certains reviendront sous forme de procès criminel se mettre en route concernant l'occupation et un une enquête va commencer sur l'ingérence étrangère maintenant qu’un accord a été trouvé entre les partis politiques sur son mandat et sa direction.
Le Parlement a repris ses travaux le 18 septembre pour ce qui sera la dernière étape avant des élections qui auront lieu en octobre 2025, ou peut-être plus tôt dans certains scénarios. Les bancs du cabinet ont été mélangés et rafraîchis, mais le contexte a changé. On a de plus en plus le sentiment que les libéraux au pouvoir sont en grande difficulté, à la traîne dans les sondages pour la première fois, alors que leurs chances de retour s'amenuisent.
De nombreuses explications sont proposées par les classe de pundit Les principaux facteurs qui pourraient expliquer le marasme libéral sont le retour de l’inflation et des taux d’intérêt qui rendent les prêts hypothécaires plus chers ou un sentiment généralisé d’insécurité économique. Le logement est apparemment le nouveau problème prioritaire des Canadiens, en particulier des jeunes familles. Le syndrome du gouvernement fatigué est peut-être le plus plausible, alors que le premier ministre approche de sa neuvième et dixième année au pouvoir. Les sondages suggèrent que la plupart des électeurs, quelle que soit leur préférence politique, pensent qu’il a simplement atteint sa date limite de consommation.
J'ai été au cœur du gouvernement pendant les derniers chapitres du mandat des premiers ministres Mulroney, Chrétien et Harper. Les derniers jours d'un mandat de longue date d'un gouvernement posent des défis particuliers à la fonction publique qui le soutient et sapent le moral des collaborateurs politiques dont l'emploi est précaire. Il en va de même pour les gouvernements successifs qui naissent lorsque le parti au pouvoir décide de changer de chef. John Turner, Kim Campbell et Paul Martin ont présidé à des successions de courte durée et sans succès de leurs prédécesseurs.
Le gouvernement Trudeau devra maintenant s’efforcer de concilier des instincts et des objectifs contradictoires. Les ministres seront impatients de faire avancer les choses, soit de terminer et de mettre en œuvre des initiatives, soit d’en lancer de nouvelles. Ils auront hâte de quitter Ottawa et d’annoncer des projets. Mais le gouvernement a du mal à prendre des décisions. Les projets traînent et les postes vacants s’accumulent.
Les sables mouvants de la politique
Désormais, le temps restant pour faire avancer la législation va rapidement diminuer comme le sable dans un sablier (pour emprunter une analogie pré-numérique). Et surtout, le contexte financier a changé contre eux. Pendant la pandémie, le Canada, comme la plupart des pays, a dépensé beaucoup d’argent en mesures sanitaires et en soutien économique aux entreprises et aux travailleurs. Aidé par un rebond des revenus, le gouvernement a pu consacrer des ressources substantielles à des programmes et à des règlements de litiges et répondre à la pression pour transférer plus d’argent aux provinces pour les soins de santé. Les dernières années ont été marquées par une croissance inhabituelle Hausse des embauches dans la fonction publique fédérale, qui est maintenant environ un quart plus grand que lorsque le gouvernement Trudeau est arrivé au pouvoir.
L’un des effets du contexte budgétaire est politique. Les libéraux risquent d’être accusés d’avoir perdu le contrôle des finances du pays et chercheront des moyens de contrer cette situation. Ils ne peuvent pas simplement dépenser pour retrouver leur popularité et devront se montrer plus sélectifs. Ils ne peuvent pas non plus faire grand-chose pour augmenter leurs recettes sans payer un prix politique élevé. Un premier pas modeste vers la prudence budgétaire a été franchi dans le budget de mars 2023. Il est peu probable que ce soit le dernier mot, car il devrait y avoir deux autres budgets avant les élections.
En savoir plus: Les coupes budgétaires du gouvernement canadien sont « précipitées », prévient un syndicat
L’autre effet se fait sentir sur la fonction publique. Cela fait dix ans que le dernier exercice sérieux de réduction des dépenses n’a pas eu lieu – celui de Stephen Harper. Plan d'action pour la réduction du déficit. Beaucoup des cadres moyens et supérieurs actuels n'ont connu que l'abondance et ont perdu la mémoire musculaire des cohortes précédentes qui ont réussi à gérer une série d'analyses des dépenses sur une vingtaine d'années. Il semble que tout doive désormais être réappris pour la première fois.
Il reste à voir si l’impératif budgétaire peut être lié au sentiment croissant que le secteur public a besoin d’une sérieuse mise à niveau. Il est difficile d’être optimiste lorsqu’on a déjà connu des périodes d’austérité. Les organismes centraux qui mènent ces exercices ont tendance à adopter une vision à très court terme. La réponse la plus courante consiste à réduire les éléments qui pourraient améliorer les capacités à long terme – formation, développement du leadership, technologie et recrutement de nouveaux talents dynamiques. Les exercices évitent généralement tout ce qui pourrait irriter les parties prenantes externes et ne sont pas conçus pour s’attaquer à des problèmes structurels plus complexes tels que la classification des emplois, le nombre et le rôle des cadres intermédiaires, le rôle de la géographie dans les embauches et les licenciements, la relation entre les prestataires de services communs et les différents ministères et organismes, etc.
Il serait néanmoins intéressant d’essayer de convaincre les partis politiques de ce qu’ils comptent faire pour améliorer le fonctionnement du gouvernement et de dénoncer les platitudes simplistes et les stratagèmes de tous bords. Je pense que, quelle que soit la plateforme politique que les Canadiens choisiront la prochaine fois, les politiciens auront rendez-vous avec la réforme du secteur public. Les élections néo-zélandaises ont suscité un certain débat et il existe une série d’initiatives au Royaume-Uni et en Australie qui méritent d’être examinées. Il est donc peut-être possible de faire mieux ici au Canada.