Article original le 6 juin 2023
Partout au Canada, le secteur public a eu du mal à mettre en place des mesures de santé publique en réponse à la pandémie, à fournir une aide d’urgence aux ménages et aux entreprises et à continuer de fournir une vaste gamme de services aux Canadiens. Ces efforts font maintenant l’objet d’un examen après action, appuyé par un large éventail de fonctionnaires et d’agents du Parlement.
Je ne peux pas témoigner personnellement du fonctionnement interne du gouvernement pendant les années de pandémie. Je me concentre ici sur la gouvernance canadienne – notre capacité en tant que démocratie et fédération à prendre des décisions et, surtout, à apprendre et à nous adapter. Au cours des trois dernières années, le Canada a été touché par ce que l’on peut seulement considérer comme une perturbation ou un « événement cygne noir » – pas seulement la COVID-19, mais aussi le mouvement Black Lives Matter, la découverte de tombes sur les sites d’anciens pensionnats, la guerre en Ukraine et le décès de la reine Elizabeth II. Rétrospectivement, la fédération canadienne a remarquablement bien fonctionné comme système de prise de décisions.
Commençons par les bases. Le Canada est une démocratie parlementaire, fondée sur le modèle de Westminster, avec l'ajout unique d'un système judiciaire. Charte canadienne des droits et libertésIl s’agit d’une fédération où de nombreux services clés sont fournis par les provinces, les territoires, les gouvernements locaux et les gouvernements autochtones.
Pendant la pandémie de COVID-19, la démocratie parlementaire s’est révélée très résiliente. Les députés et les sénateurs ont appris à utiliser des plateformes en ligne pour se réunir et travailler, et ils continuent désormais d’utiliser des approches hybrides pour les réunions de commission. Au plus fort de la pandémie, les partis ont travaillé ensemble pour adopter des programmes d’aide d’urgence et ont reporté une grande partie de l’examen à plus tard.
La responsabilité envers les citoyens n’a pas été perturbée ni suspendue. Grâce à une certaine souplesse et à une certaine adaptation des autorités électorales et des candidats, nous avons eu une élection fédérale, sept élections provinciales et deux élections territoriales, des élections municipales complètes et un assortiment d’élections partielles. Un million de Canadiens ont voté par correspondance en 2021, ce qui nous a permis de tirer des leçons précieuses pour l’avenir.
Un test de toutes les branches et de tous les niveaux du gouvernement
Le système judiciaire et une panoplie de tribunaux ont continué de fonctionner. Un « chien qui n’aboie pas » au Canada serait deux nominations à la Cour suprême en 2021 et 2022 sans la rancœur partisane amère que nous voyons au sud de la frontière.
Le rôle de la Couronne fait partie intégrante de notre logiciel de base. La démission d’un gouverneur général en 2021 et le décès de la reine en 2022 ont permis une transition en douceur vers leurs successeurs, tandis que l’institution elle-même poursuivait ses activités.
La fédération canadienne a su réagir aux nombreuses décisions qui devaient être prises. Aux États-Unis, les gouvernements des États étaient divisés en fonction de lignes partisanes et de nombreux gouverneurs et assemblées législatives des États républicains ont activement combattu et sapé les initiatives fédérales et attaqué les responsables fédéraux de la santé. Au Canada, les ministres et les responsables de la santé publique ont travaillé en étroite collaboration sur l'approvisionnement et la distribution des vaccins, et les mesures de santé publique ont généralement été mises en œuvre au même rythme.
Aucun des premiers ministres ou des maires n’a vu d’avantage à se battre avec le gouvernement fédéral, pas même en janvier 2021, au plus fort de la coalition disparate des forces anti-confinement et anti-vaccination.
Le degré élevé d’alignement des mesures de santé publique au sein de la fédération a manifestement permis de sauver des vies. Plus de 89 pays ont taux de mortalité plus élevés – notamment les États-Unis, le Royaume-Uni et la France.
La résilience de notre fédéralisme avait été mise à l’épreuve avant la pandémie. Les partis d’opposition et les premiers ministres ont également fait preuve d’une unité et d’une efficacité remarquables lorsque l’ancien président américain Trump a posé un menace existentielle à notre économie. Personne n’a bougé et sapé l’unité de l’équipe canadienne qui a contrecarré sa menace de résiliation de l’ALENA pendant qu’Ottawa négociait un nouvel et meilleur accord.
Une manifestation et une loi non testée
L'occupation du centre d'Ottawa au début de 2022 a peut-être été le test le plus clair de la gouvernance et du fédéralisme du Canada. Ce qui a commencé en apparence comme une manifestation visant à persuader les gouvernements démocratiquement élus de modifier des politiques spécifiques s'est transformé en un ensemble bizarre de revendications, notamment le remplacement du gouvernement Trudeau démocratiquement élu. Pour emprunter une métaphore médicale, le corps politique canadien les a rejetées catégoriquement. Le Parlement et le Cabinet ont continué de se réunir. Les Canadiens ont continué à soutenir les mesures de santé publique et à appuyer les actions qui ont mis fin à l'occupation. La solidarité des premiers ministres provinciaux n'a pas faibli. L'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence et l’examen de son utilisation a été un exercice réussi de démocratie résiliente.
La réponse du secteur public dans son ensemble, qui soutient les gouvernements élus, a été remarquable. Les plus grands chocs causés par la pandémie ont touché l’éducation de première ligne et, bien sûr, les soins de santé primaires, les résidences pour personnes âgées et les établissements de soins de longue durée. Ces systèmes ont plié, mais n’ont pas craqué. Il y aura d’autres pandémies et urgences sanitaires, il est donc important d’intégrer les leçons apprises et d’investir dans la préparation.
Le choc économique résultant des fermetures, du ralentissement de la chaîne d’approvisionnement et des pénuries de main-d’œuvre souligne la nécessité de travailler sur des filets de sécurité plus solides pour les travailleurs et les petites entreprises.
Au-delà de la réponse sanitaire de première ligne ou de l’aide économique d’urgence, des secteurs du secteur public élargi, habituellement réticents au changement, ont procédé à des ajustements rapides à un rythme qui prendrait normalement une décennie ou plus. Certains changements deviennent des éléments durables de la normalité post-pandémique. Les tribunaux et les cours ont fait des progrès considérables dans leur approche des processus de travail. Les universités et les collèges se sont tournés vers l’enseignement et l’évaluation en ligne. Certains lieux de travail adoptent cette approche. outils de travail basés sur une plateforme et de rompre le lien entre le lieu de résidence et le lieu de travail. Mais bien entendu, tous les lieux de travail du secteur public n’offrent pas cette possibilité.
Moins connues sont les histoires cachées à la vue de tous sur la façon dont l'Agence des services frontaliers, la Garde côtière canadienne et d'autres a maintenu le commerce fluide Tout en appliquant les restrictions sanitaires, on accordera peu d’attention à la façon dont les organismes du secteur public ont maintenu leurs services après avoir renvoyé une grande partie de leur personnel chez eux avant la vaccination généralisée. Par exemple, le recensement de mai 2021 a été une réussite exceptionnelle, tout comme les trois cycles de collecte des impôts. On accordera encore moins d’attention à la façon dont les services internes du gouvernement fédéral, qui rendent tout cela possible, ont trouvé des moyens de faire face et d’innover.
Maintenant que le Canada sort de la pandémie et de tous les autres chocs associés, il convient de reconnaître à quel point ce pays continue de bien se comporter sur les indices de liberté, transparence et le État de droit. Notre gouvernance de base est restée ouverte et démocratique malgré le stress.
Prise de risque proactive en « temps de paix »
Le journaliste Paul Wells déclare dans son récent livre Une urgence à Ottawa« Le plus dur, quand on sait comment l’histoire se termine, c’est de se rappeler ce qu’on a ressenti en ne sachant pas comment elle allait se terminer. » Nous devons éviter de céder au biais rétrospectif lorsque nous examinons le bilan des trois dernières années. Nous devons également éviter l’erreur de composition – supposer que ce qui est vrai pour une partie est vrai pour l’ensemble – et éviter de généraliser à partir de problèmes spécifiques parmi les centaines d’organisations du secteur public et de conclure que l’ensemble du système est défaillant.
Le défi consiste désormais à faire en sorte que cet esprit de prise de risque proactive soit suffisamment présent et à le maintenir en « temps de paix ». Les politiciens et les fonctionnaires auront tendance à revenir à d’anciens comportements et mentalités, où l’aversion au risque est renforcée par les boucles de rétroaction. Il existe un danger clair et présent qu’à mesure que les gouvernements s’efforcent d’assainir leurs bilans, ils réduisent leurs investissements dans les capacités de notre secteur public.
Chaque choc subi par le pays est une occasion d’apprendre, de s’adapter et de s’engager à faire mieux à l’avenir. Nous devons redoubler d’efforts dès maintenant pour investir dans la formation et le développement du leadership et pour renforcer la chaîne d’approvisionnement des idées, pas seulement en matière de politique mais surtout pour améliorer le fonctionnement du secteur public.
La gouvernance du Canada s’est révélée résiliente. Mais il ne faut pas relâcher nos efforts. Il faudra redoubler d’efforts pour protéger la démocratie et renforcer le secteur public dans toutes les régions de la fédération, à mesure que la politique devient plus hostile et que l’espace de parole publique se rétrécit. Cela nous aidera à être prêts pour le prochain choc, quand il surviendra inévitablement.